
Les sous-produits de l’industrie chimique sont généralement traités comme des déchets ultimes. Pourtant, leur composition leur donne de la valeur n’est-ce pas ?
En effet, ce n’est pas un secret de dire que les résidus de traitement contiennent des sous-produits valorisables. L’acide phosphorique, par exemple, contient des éléments tels que du vanadium et du scandium que l’on retrouve également dans les résidus de production du titane. Les boues rouges, qui résultent de l’extraction de l’aluminium, contiennent également du scandium et du titane. Il peut également y avoir de l’uranium dans les phosphates.
Tous ces sous-produits sont aujourd’hui traités comme des déchets ou parfois vendus tel quel comme agents chimiques pour d’autres procédés. C’est dommage car ils peuvent représenter une valeur d’autant plus importante qu’un grand nombre des éléments présents dans ces sous-produits figurent parmi les matières premières critiques identifiées au niveau européen. Sans oublier que la valorisation de sous-produits ou de déchet répond à des enjeux environnementaux et d’économie circulaire.
Valoriser ces sous-produits est donc une évidence au regard des enjeux environnementaux. En quoi le CIME est un acteur clé sur ce marché ?
Le CIME, précédemment le SEPA qui a vu le jour il y a plus de 40 ans ,fait partie du groupe Orano et dispose d’une expertise historique dans le développement de procédés d’extraction et de purification dans le domaine minier mais aussi dans l’agroalimentaire, la santé ou l’environnement. Nous disposons d’installations et d’équipes pluridisciplinaires capables de construire et d’opérer des pilotes ainsi que d’une expertise en hydrométallurgie pour la valorisation des métaux stratégiques issus de résidus de traitement ou de déchets.
En s’intéressant à la valorisation des sous-produits, Orano se positionne également sur les enjeux de criticité européenne de certaines matières premières.
Comment cela se traduit exactement ?
Pour la méthodologie, nous validons d’abord la chimie à petite échelle dans notre laboratoire puis montons des pilotes pour valider le procédé sur des volumes plus importants. Notre objectif est d’obtenir le bon enchainement d’opérations d’opérations en simplifiant au maximum le procédé.
Notre atout, c’est notre capacité à s’adapter aux spécifications demandées par les utilisateurs finaux de nos produits raffinés. En s’intéressant à la valorisation des sous-produits, Orano se positionne également sur les enjeux de criticité européenne de certaines matières premières.
C’est aussi un moyen de se diversifier pour toucher des marchés à fort potentiel de développement. Le scandium, par exemple, est utilisé dans le secteur hydrogène pour les piles à combustible ou encore dans le secteur de l’aéronautique et de l’automobile où il permet la fabrication d’alliages plus résistants et plus légers – et donc au final permet une baisse de la consommation de carburant.
Le vanadium, quant à lui, est principalement utilisé en métallurgie comme métal d’alliage dans les aciers ou encore dans les batteries pour proposer une solution à longue durée de vie ayant une efficacité énergétique élevée.
Sur le papier, la démarche est alléchante, mais dans la réalité, où en êtes-vous ?
La démarche avance à grands pas. Preuve en est notre projet-phare : Projet ScaVanger dont l’objectif est de développer une production durable de scandium en Europe par la valorisation de co-produits issus de l’industrie du titane. L’industriel Kronos nous a permis d’utiliser un de ses sous-produit de production pour en extraire le scandium et le vanadium avant que ce résidu ne soit ensuite valorisé. Nous avons ainsi obtenu 1 kg de scandium purifié (à 99,9%) des 12 m3 de matière qu’il nous avait fournis. Le vanadium extrait et traité par le CIME affiche également une pureté à 99%.
Nous avons atteint les objectifs du projet. Notre expertise allant jusqu’à l’accompagnement dans la mise en place d’unités industrielles, nous travaillons maintenant sur la validation du bon business model avec pour ambition d’installer une unité de démonstration chez notre client d’ici 2027, unité qui aurait une capacité de production annuelle de plusieurs tonnes de Scandium et de Vanadium.
Il y a donc de véritables perspectives business pour les années à venir ?
Le marché du scandium est encore naissant mais les perspectives sont prometteuses. Dans le cadre du projet ScaVanger, une « coopérative », rassemblant tous les acteurs du scandium, a été créée.
Objectif : coconstruire le marché pour petit à petit augmenter les capacités de production. Airbus, qui fait partie de ce consortium envoie des signaux intéressants : il a déposé des brevets pour l’utilisation du scandium et suit de près nos évolutions. Et l’on voit bien aussi l’accueil très favorable réservé à nos différentes interventions sur le sujet en congrès, et que dire du Prix de l’innovation que nous avons reçu en 2024 de l’A3TS (Association de traitement thermique et de traitement de surface) ! Les choses bougent et nous sommes d’ailleurs déjà sollicités sur un autre projet : Projet Euro titan afin de valoriser le titane dans les boues rouges issues de l’extraction de l’aluminium.
Le CIME a tout pour occuper une place de choix sur ce marché de la valorisation des sous-produits. Notre expertise est reconnue tout comme notre excellence opérationnelle et nous avons la capacité d’optimiser des procédés existants ou de développer des procédés innovants pour nous adapter et répondre aux besoins d’aujourd’hui et de demain !
Les projets ScaVanger et EURO-TITAN sont co-financés par l’Union Européenne