En France, le cycle du combustible démarre avec l’extraction du minerai d’uranium et s’achève avec l’opération de séparation des matières valorisables d’un côté et le conditionnement des déchets ultimes issus des combustibles usés de l’autre. Dans ce cycle, on va distinguer la partie avant le chargement en réacteur (l’amont du cycle) de la partie après le déchargement du réacteur (l’aval du cycle).
Pourquoi l'uranium ?
Depuis environ 400 000 ans et la domestication du feu, l’homme se sert de la combustion pour produire de l’énergie. Brûler un combustible va donc dégager de l’énergie sous forme de chaleur. Ce sera le cas notamment pour le bois, le gaz, le pétrole ou encore le charbon. Pour l’énergie nucléaire, l’uranium sert de combustible et la chaleur dégagée se fait par la fission des noyaux qui composent l’intérieur des atomes (réaction nucléaire).
Mais comme on ne met pas directement du pétrole brut sorti du puits dans le moteur de sa voiture, l’uranium va être transformé afin de pouvoir être chargé dans un réacteur.La partie amont du cycle du combustible nucléaire se divise en 4 étapes avant de devenir un combustible utilisable en réacteur.
L’extraction de l’uranium se fait pour la France dans des mines à l’étranger avec le souci d’une répartition géographique qui garantit l’approvisionnement en minerai. On trouve les principaux gisements de ce type de minerai aussi bien en Amérique du Nord, en Océanie, en Afrique ou en Asie Centrale. Une fois extrait, le minerai d’uranium doit être concassé et broyé puis enfin traité afin d’être concentré. En effet, on ne compte que quelques kilos d’uranium par roche extraite. Cette opération de concentration par traitements physique et chimique permet donc d’obtenir une poudre jaune appelée communément « yellow cake ».
Afin d’augmenter la capacité énergétique pour une même quantité de minerai, il est nécessaire d'utiliser un uranium plus « fissile » donc plus riche en uranium 235. Démarre alors une étape dite de « conversion ». Cette activité de conversion consiste à transformer le concentré d’uranium de départ en hexafluorure d’uranium (UF6). Pour en arriver là, on va recourir à plusieurs traitements chimiques et passages dans des fours à haute température. Cet hexafluorure (UF6) est ensuite acheminé sous forme solide dans des conteneurs vers l’usine d’enrichissement.
L’enrichissement de l’uranium en uranium 235 se fait par un procédé technique où l’on fait tourner à très haute vitesse l’UF6 que l’on transforme en gaz. Cette « ultracentrifugation » permet d’enrichir l’uranium qui passe ainsi d’une valeur naturelle de 0,7 % à 3 ou 4 % en uranium 235. Ce niveau est suffisant pour créer des combustibles fissiles (aptes à produire plus d’énergie) lors de son utilisation dans les centrales nucléaires. L’uranium enrichi est utilisé par 90 % des réacteurs nucléaires en fonctionnement dans le monde aujourd’hui.
L’ensemble de ces étapes de conversion et d’enrichissement sont réalisées dans les usines d’Orano en France : à Malvési pour la 1ère étape de conversion puis au Tricastin pour la 2ème étape de conversion
(usine Philippe Coste) et l’enrichissement (usine Georges Besse 2).
L’UF6 enrichi est ensuite transféré sous une forme solide vers une usine de fabrication d’éléments combustibles. Il est alors transformé en une poudre noire : l’oxyde d’uranium (ou UO2). On va presser cette poudre sous forme de petites pastilles cylindriques (le « frittage ») qui seront cuites dans un four à haute température (1 800 degrés). Ces pastilles vont être ensuite empilées dans de longs tubes (4 mètres) en zyrcaloy (alliage particulier) appelés «crayons ». Une structure rigide va rassembler l’ensemble de ces crayons et ainsi former un assemblage combustible.
Le temps nécessaire depuis l’extraction du minerai d’uranium jusqu’à la fabrication du combustible est d’environ deux ans. Quand l’assemblage combustible produit de l’énergie dans le réacteur,
il va perdre des éléments fissiles et devenir de moins en moins réactif : du plutonium va se former et des produits de fission vont apparaître. L’assemblage est conçu pour séjourner entre
3 et 4 ans à l’intérieur du cœur d’un réacteur. Il devient donc nécessaire de décharger du cœur ces assemblages moins efficaces. Ils contiennent cependant encore des matières
énergétiques valorisables (uranium et plutonium). La partie de l’aval du cycle va démarrer.
Le saviez-vous ? Un combustible nucléaire usé contient 96 % des matières réutilisables
En France la partie aval du cycle peut également se diviser en 4 étapes principales.
Les combustibles usés sont sortis du cœur du réacteur pour être refroidis quelques mois dans les piscines de la centrale nucléaire. Ils sont ensuite transportés vers une usine de traitement (usine de la Hague dans le Cotentin). Dans cette installation, on récupère les matières énergétiques valorisables (95 % d’uranium et 1 % de plutonium). On va pour cela réaliser diverses opérations mécaniques (on cisaille les combustibles) et chimiques (on dissout et on sépare les matières avec de l’acide et des solvants).
Le plutonium lui aussi contient énormément d’énergie. Un gramme de cette matière produit autant de chaleur qu’une tonne de pétrole ! Il est transformé lui aussi en une matière solide (oxyde)
pour être envoyé vers une usine de fabrication de combustible MOX (Mélange d’OXydes
ou Mixed OXides). Cette fabrication est réalisée en France dans l’usine Orano Melox au sein de la plateforme
industrielle de Marcoule dans le Gard.
Un gramme de plutonium produit autant d’énergie qu’une tonne de pétrole
Lors des opérations de traitement des combustibles, on va également isoler et conditionner des produits de fission (3 % du combustible initial) qui vont constituer les déchets radioactifs. Ils contiennent la quasi-totalité de la radioactivité du combustible de départ et ne sont plus valorisables. Ils sont fondus (mélangés) à de la fritte (poudre) de verre et coulés dans un conteneur en acier inoxydable. Ainsi conditionnés par ce procédé dit de « vitrification », ils sont prêts à être entreposés dans des puits refroidis par un système de ventilation naturelle sur l’usine de la Hague en France.
Même s’il existe d’autres type de déchets radioactifs, les déchets vitrifiés issus des produits de fission sont les plus radioactifs avec la « durée
de vie » la plus longue. Ils sont alors destinés à être transportés vers un site de stockage définitif en profondeur aujourd’hui en cours d’étude (projet CIGEO par l’ANDRA).
Les déchets radioactifs de haute activité représentent moins de 5 grammes par an et par habitant, soit l’équivalent d’une pièce de 20 centimes d’euro.
En maîtrisant l’ensemble du cycle du combustible, de l’extraction de l’uranium jusqu’à la réutilisation des matières valorisables du combustible usé, la France a fait le choix d’un
cycle dit « fermé ». Cette stratégie du traitement-recyclage du combustible, maîtrisée par Orano dans ses usines de la Hague et de Melox, vient d’être validée par l’Etat français
au-delà de 2040.